Conservé aux archives du diocèse de Périgueux et Sarlat, l’unique manuscrit autographe connu de la Suite courte pour flûte et harpe chromatique ne porte aucune date. Cependant, deux informations pourraient permettre de donner une datation approximative de cette œuvre. Tout d’abord, un document écrit de la main du compositeur mentionne cette œuvre et précise « chez Fougeray ». Cet éditeur publiera plusieurs ouvrages de La Tombelle après la Première Guerre mondiale et il semblerait que la Suite courte devait l’être un jour. En outre, à la lecture du catalogue complet du musicien, on remarque la présence de plusieurs morceaux de musique de chambre intitulés « Suite » durant les années de guerre. Pensons à la Suite pour trois violoncelles, composée vers 1914 et éditée par Maurice Senart en 1921, ou encore à la Suite brève pour deux violons et piano, pièce en quatre mouvements aujourd’hui perdue, dédiée très certainement à Fernand et Jacques Lespine et créée avec le concours de l’auteur en 1916. L’essentiel de la production de La Tombelle composé durant le premier conflit mondial étant demeuré inédit, il est permis de se demander si la Suite courte ne daterait pas de cette période.
Divisée en trois mouvements, l’œuvre débute par un Prélude usant largement de carrures régulières, de marche de septièmes sur le cycle des quintes, d’harmonies sur pédale de tonique ou dominante, de cadences parfaites traditionnelles. Ces éléments marquent de la part de La Tombelle une volonté de retour à un certain classicisme, comme c’est le cas dans d’autres de ses pièces composées à la même période. Contraste total dans le second mouvement, Improvisation, qui lui, comme son titre l’indique, propose une plus grande liberté de forme. Ainsi, on trouve ici des accompagnements en arpèges, des sons harmoniques, une plus grande variété rythmique, de courts passages similaires à des cadenza. L’introduction de cette seconde partie n’est d’ailleurs pas sans rappeler une autre œuvre pour harpe du compositeur : la Fantaisie Ballade pour harpe à pédales. Après le temps du rigorisme, puis celui de la souplesse, vient avec le troisième mouvement le moment de la Danse. Alliant la précision rythmique du premier à la fantaisie du second, ce bref mouvement conclut l’œuvre de manière enjouée avec l’emploie de rythmes répétitifs syncopés dans l’accompagnement et pointés dans la partie mélodique dévolue à la flûte.
Tout au long de la pièce, la tonalité principale reste celle de la mineur, ce qui confère une cohérence générale, mais la différence de caractère des trois mouvements offre également à cette Suite courte une réelle variété de ton.
Compte tenu de la rareté des instruments chromatiques de la maison Pleyel de nos jours, on ne peut que conseiller d’interpréter cette œuvre, soit en l’adaptant quelque peu pour la harpe diatonique, soit en la jouant telle qu’écrite, mais au piano.
Panorama de presse
Les éditions Symétrie ont commencé à tirer de l’oubli certaines de ses œuvres, souvent inédites. La Suite courte pour flûte et harpe est révélatrice du penchant de La Tombelle pour le classicisme à l’époque de la Première Guerre mondiale : élégance, transparence et sens mélodique s’imposent avec un clin d’œil aux musiques populaires de nos régions. Pièce brillante et virtuose, pas seulement pour le violoncelle, c’est un véritable duo.
Alain Pâris, La Lettre du musicien
Nomenclature
flûte et harpe chromatique [ou piano]