Dans un conte d’Anatole France, au roi de Perse mourant qui voulait apprendre « l’histoire universelle des hommes » mais n’aura plus le temps de lire les volumes compilés par ses savants, leur doyen, dans l’oreille, murmure ce résumé : « Ils naquirent, ils souffrirent, ils moururent… »
Je ne sais si Paul Éluard a conçu ses Exemples comme un apologue. Mais les poèmes que j’ai retenus parmi la quarantaine de ce recueil peu fréquenté me semblent aujourd’hui, à bientôt trente ans de distance, résumer eux aussi, à leur manière énigmatique, la même histoire, et c’est probablement ce qui me les a fait réunir. Qui les prend au mot, et donc à l’image, est frappé de ce chemin furtivement mais fermement tracé. Voici la jeunesse, avec son cœur gonflé de rêves, et qui pense avoir vaincu l’ennemi intime en feignant simplement de l’ignorer ; voici le souvenir d’une enfance à tire-d’aile, et l’angoisse d’en voir disparaître la vertu émerveillante ; voici enfin le corps désemparé, l’âme appauvrie, l’usure infatigable du temps.
Ce raccourci – tardif, encore une fois, et fruste, comme ils le sont tous – ne doit pas incliner l’interprète à assombrir d’emblée sa palette ; au contraire, dans les premiers morceaux j’entends plutôt du blanc que du gris : celui des vitres, de la neige, du ciel à découvert. On avance innocemment, à pas comptés, jusqu’au cri final qui avouera le bonheur refermé et les maisons toujours fugitives.
Sommaire
- I. Dormeur
- II. Cantique
- III. Vieillir
- IV. Fins
Extraits sonores
Un enregistrement sur disque compact des Quatre Exemples tirés des nécessités de la vie est disponible sous le label Timpani.
Panorama de presse
[Guy Sacre] a offert à la mélodie française le lieu où l’esprit et la lettre se confondent en cette profonde unité que seule une concision magistrale et un sens aigu du style sont à même de produire.
Nicolas Bacri, La Quinzaine littéraire
Nomenclature
voix moyenne et piano