Deux Poèmes de Jean Tardieu

On aime et on admire d’ordinaire, chez Tardieu, le virtuose ouvrier du langage, qui démonte si drôlement, et si cruellement, les rouages de notre parler, de notre entendre, et fait feu de tout le désolant échange verbal entre les pauvres créatures que nous sommes, condamnés à professer l’inanité de l’homme au moyen de quelques phonèmes…

Les deux poèmes que j’ai retenus sont d’une encre différente. On y découvre un poète lyrique, aux accents presque raciniens, et que les mots n’ont pas encore abusé, qui n’a pas encore l’ironie – ou pire : le sarcasme – dans son carquois. D’ailleurs il avance nu, je veux dire sans armes, ouvert à l’étonnement, au flamboie­ment du monde, ouvert même aux dieux, ce qui achève de me toucher. Le « non » est facile, on le lit à satiété dans ses ouvrages, où l’humour sert à farder tant bien que mal la sinistre « Môme néant ». Le « oui » est compliqué, gagné de haute lutte avec les éléments, avec les êtres, avec soi-même, âme et corps ; et même de biais, à mi-voix, il porte plus loin son écho, – et sa grâce.

Guy Sacre

Sommaire

Je n’attends pas un dieu plus pur
Quand la nuit de mon cœur