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Für die jugend

Cinq madrigaux amoureux et guerriers pour voix et percussion créés par Dominique Visse et Clément Ducol (Paris, la Péniche Opéra, mars 2011).

Dans cette partition, tout un ensemble de mouvements a été pensé et élaboré en rapport intime avec les textes et musiques. Autant les sonorités que les sens ou émotions qui en émanent. « Émotion », du latin movere, signifie d’abord ce mouvement, cet ébranlement du corps et de tout l’être qui nous relie aux langages les plus lointains, les plus archaïques. Nous rattachent aux échanges d’avant Babel, pour dire les secrets et tourments de l’amour. Ce recours au geste parlant, Monteverdi l’avait déjà ardemment suscité ; le genre représentatif du nouveau madrigal à voix seule, avait fait germer de telles intentions notamment pour le célèbre « Tancrède et Clorinde ».

Dans la lignée du stile rappresentativo, la partition de Für die Jugend, affine ces recherches en précisant une notation gestuelle, aussi claire que possible, sans être pour autant contraignante. Quasi chorégraphique, celle-ci se résume à quelques signes simples que les interprètes pourront réinventer et amplifier à leur gré, tout en respectant les déplacements et disposition des instruments indiqués ci-après. Car, seule une mise en espace de ce « spectacle musical » (ni plus ni moins rigoureuse que la notation rythmique), dépouillée de tout poncif, pourra donc libérer une émotion singulière, et en dehors de tous lieux communs, faire surgir quelque sentiment profondément enfoui, écrasé au cœur de l’auditeur, aussi spectateur actif.

Bien qu’exigeant des interprètes chevronnés, ce recueil est vraiment un Album pour la jeunesse, non pas directement pédagogique (en tout cas pas davantage que l’œuvre éponyme de Schumann) mais plutôt dans le sens où l’entendait Victor Hugo dont le poème reste d’une brûlante actualité. Seul l’esprit de la jeunesse peut raviver l’enthousiasme amoureux et retarder le désastre des « cuistres » contemporains.

En composant cette œuvre, j’avais présent à l’esprit le mot d’Albert Camus : « Je me révolte, donc je suis ! »