Passé à la postérité avec ses opéras, comme Manon (1884), Werther (1892) ou Don Quichotte (1910), Jules Massenet (1842-1912) a également composé au début de sa carrière quatre opérettes, connues jusqu’à présent seulement par leur titre. Après deux essais de jeunesse, L’Écureuil du déshonneur (1858) et Les Deux Boursiers (1859), il compose bien plus tard deux ouvrages en un acte, L’Adorable Belboul (1874) et Bérengère et Anatole (1876). Il ne les fit cependant jamais publier, sans doute pour préserver son image de compositeur sérieux qu’il souhaitait se forger au début de sa carrière.
Représentée pour la première fois en mars 1874, la partition fut longtemps considérée comme perdue, voire détruite à la demande de son auteur. Myriam Chimènes remet en cause cette double hypothèse après avoir découvert dans la presse l’existence d’une nouvelle représentation, le 27 avril 1903, en présence de Massenet. Les doutes de la musicologue se sont avérés fondés lorsque le manuscrit musical refait surface lors de deux ventes chez Sotheby’s à Londres en 2013 puis en 2014. Ce document exceptionnel constitue une des découvertes majeures dans l’historiographie massenetienne de ces dernières années, car il éclaire un aspect méconnu de la production du compositeur et enrichit notre connaissance d’un répertoire méconnu : l’opéra de salon.
Assez courte et découpée en un acte, L’Adorable Belboul appartient au genre de l’opérette, voire de l’opéra bouffe, par ses caractéristiques littéraires et musicales. Les dialogues parlés, qui alternent avec des morceaux chantés de facture traditionnelle (« Couplets », etc.), occupent une place importante dans l’œuvre. Les librettistes ont en outre recours aux stichomythies – dialogues où les personnages échangent des répliques courtes et versifiées – qui abondent dans les scènes comiques.
L’Adorable Belboul est une œuvre à part dans la production de Massenet, le compositeur offrant avec cet ouvrage une parodie de turquerie, conçue avec des moyens très simples mais non dénuée de qualités. Massenet s’investit d’ailleurs sérieusement dans la composition de son ouvrage : il s’approprie véritablement le livret qu’il n’hésite pas à modifier pour lui faire gagner en théâtralité. De même, les morceaux chantés, finement écrits et constamment bien harmonisés, dénotent une connaissance subtile du répertoire de l’opéra-comique.
Synopsis
Sidi-Toupi, un jeune derviche tourneur, tombe amoureux de la belle Zai-Za, dont le père, le riche marchand Ali-Bazar, tient à marier d’abord sa première fille, Belboul, moins bien dotée par la nature. Les 11 scènes déroulent le stratagème mené par Fatime, la servante complice, pour faire épouser Belboul à la place de sa maîtresse.
Panorama de presse
L’équipe de musicologues de l’université de Lorraine, sous la direction de Jean-Christophe Branger et Nicolas Moron, a signé, en guise d’introduction, une remarquable étude où l’on va de découverte en découverte.
Alain Pâris, La Lettre du musicien
Péripéties, stratagèmes, situations comiques, retournements de situation… une série d’éléments qui composent cet ouvrage et qui devrait ravir tant les institutions musicales que les mélomanes puisque l’œuvre se destine à cinq solistes, une clarinette, un trombone et deux pianos, un effectif facile à réunir et relativement moins couteux qu’un grand orchestre. Un ouvrage à découvrir, largement explicité (sources, bibliographie, notes critiques…). Soulignons le travail au cordeau des éditions Symétrie qui continuent d’offrir à des prix démocratiques des ouvrages totalement oubliés qui trouvent dès lors une seconde vie.
Ayrton Desimpelaere, Crescendo Magazine
L’œuvre, tenant à la fois de l’opérette et de l’opéra bouffe, est bien agréable à découvrir. Une copieuse préface donne toutes les indications à la fois de l’histoire de l’œuvre, de ses exécutions et en analyse le style léger et facétieux.
Daniel Blackstone, L’éducation musicale
Nomenclature
5 solistes (S, S/Mezz, Mezz/A/T, T, Bar), clarinette, trombone et 2 pianos