Tout au long de sa vie, Sauguet a été lié avec des artistes de générations et d’horizons très divers : compositeurs, bien sûr, interprètes, chorégraphes et danseurs, poètes, hommes de théâtre, peintres et décorateurs, cinéastes… Il a souvent évoqué ses nombreuses amitiés constituant dans son esprit une famille spirituelle à laquelle il a consacré nombre de pages de circonstances, hommages, témoignages (Prélude à une exposition de peinture, pour un vernissage à la galerie Rive Gauche en 1937 ; Toast pour Henry Barraud pour célébrer son action au sein des institutions radiophoniques françaises ; 80 notes clavecines, composé à l’occasion des 80 ans de Wanda Landowska).
« La marquise de Casa Fuerte, Yvonne Giraud qui avait été condisciple de Darius Milhaud au Conservatoire national où elle travaillait le violon (elle emporta le premier prix, elle en jouait en virtuose), était venue habiter avec nous [Max Jacob, Vittorio Rieti, René Laporte, etc.] à l’hôtel Nollet. Elle eut l’idée géniale de constituer une société de concerts qui exécutaient nos musiques et celles des musiciens de notre temps de toutes tendances, mais dont elle estimait la valeur » , écrit Sauguet dans La Musique, ma vie. C’est dans le cadre de ces concerts de La Sérénade, parmi les œuvres de Poulenc, Weill, Markévitch, Prokofiev ou Milhaud, que Sauguet voit nombre de ses pages interprétées, le plus souvent en création : La Contrebasse, La Voyante, Fastes, Polymètres, Les Jeux de l’amour et du hasard, Petite Messe pastorale… Yvonne de Casa Fuerte est contrainte de quitter l’Europe au début de l’année 1941 pour les États-Unis ; elle est engagée comme violoniste au sein d’un orchestre new-yorkais. À l’issue de la guerre, elle rentre en France et travaille auprès de l’ambassade des États-Unis pour le Centre culturel américain.
À l’occasion de ses quatre-vingts ans en janvier 1975, Sauguet lui dédie deux pièces pour violon seul, Berceuse et Romance, lointains échos des concerts de La Sérénade.